« D'après tous les témoignages oraux et écrits que j'ai
pu recueillir de ceux qui étaient au Séminaire français à cette époque, l'abbé
Marcel Lefebvre ne prit jamais part aux discussions sur l'Action française.
D'ailleurs jamais le Père Le Floch ne parla de Maurras dans ses conférences. La
sainte théologie sur la royauté sociale de Notre Seigneur Jésus Christ et toute
la doctrine sociale de l'Eglise se suffisaient bien à elles seules. Ajoutons
que notre séminariste était plutôt effacé, doux, régulier.
« Au bout de quelques semaines de séminaires presque
tous avaient un surnom, les Français restent les Français. Ainsi l’abbé
Elchinger (1), c’était « le bel Artur », l’abbé Marcel Lefebvre c’était
« l’Ange » du séminaire, car m’a dit un des anciens, « il s’imposait
par sa piété, son esprit d’obéissance et son ardeur au travail ». Il fut
sacristain, puis premier cérémoniaire sous la direction du célèbre père Heguy,
une sommité en liturgie. Or, à Rome, au grand Séminaire français, la fonction
de sacristain qui suppose l’autorisation de toucher les vases sacrés, ainsi que
celle du cérémoniaire, n’étaient réservées qu’aux élèves modèles. »
« C’est à cette époque que se situe la prédiction
mystérieuse faite par le pape Pie XI au futur archevêque. Un groupe de pèlerins
s’était vu accorder la faveur d’une audience privée. Monsieur et Madame Lefebvre
étaient du nombre, ainsi qu’un de leur fils, Monsieur l’abbé Marcel, alors
sous-diacre. Les visiteurs se tenaient debout en demi-cercle dans la salle d’audience.
Le pape en faisant lentement le tour, félicitant certains et les bénissant. L’abbé
Marcel glissa un mot au maître de cérémonie : Pourriez-vous signaler à Sa
Sainteté que je lui serais reconnaissant de bien vouloir bénir mes chers
parents qui ont cinq enfants dans les ordres.
« Le Saint-Père de s’approcher alors et de poser les
deux mains sur la tête du jeune abbé tout en disant à haute voix : « Vous
avez bien mérité de l’Église ». Comment convient-il d’interpréter ces
paroles ? Était-ce là un simple compliment formulé à l’adresse des
parents, dans la direction desquels le regard du Saint-Père venait de se
tourner ? Était-ce en même temps une prophétie secrètement destinée à la
jeune tête qu’il venait de bénir ? C’était là un mystère que l’avenir
éclairera peut-être. »
Père Jean-Jacques
Marziac, Monseigneur Marcel Lefebvre,
soleil levant ou couchant ?, NEL, 1979, pp. 81-82
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