A la fin de sa vie, Mgr Lefebvre reconnaissait que l’histoire de la
Fraternité, c’était l’histoire de ses divisions. La position délicate de
l’œuvre au sein de l’Église l’exposait de manière particulière aux dissensions.
Ce n’est pas dans une autre situation que se trouvait la Compagnie de Jésus à
l’époque où elle a réinsufflé la foi à travers le monde : Tantôt admirée,
tantôt proscrite, elle fut également saluée, puis décriée, parfois déchirée.
Dans son histoire, la Fraternité a donc connu des divisions d’un côté
comme de l’autre. Elle a vu s’éloigner tour à tour le directeur d’Écône, celui
du séminaire américain, un des assistants généraux, un supérieur de La Reja, un
ancien curé de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, un des quatre évêques. Nul n’a été
épargné, pas même les plus grands ! Le fondateur qui, un instant, a failli être
mis de côté du séminaire qu’il avait fondé, ayant renvoyé à un autre moment
tout le personnel de son district américain, ne s’étonnait guère de ces
épreuves. D’une certaine manière, ces attaques étaient la preuve que le démon
s’acharnait contre une œuvre qui exerçait un bien immense dans les âmes, tout
en continuant activement sa mission.
A l’occasion d’un départ groupé de prêtres, Mgr Lefebvre décrivait les
écueils auxquels était exposée la Fraternité. Après avoir montré que certains
tombaient par usure et découragement, relativisant les erreurs, embrassant la
nouvelle messe, il montrait aussi, comme c’est le cas actuellement, que
plusieurs trouvaient des prétextes et des calomnies pour justifier un départ se
fondant sur un soi-disant abandon de la part des autorités de la FSSPX. Ainsi
s’exprimait-il à ses prêtres, le 16 juillet 1989 :
« La deuxième tentation que le diable
suscite dans l'esprit de certains de nos prêtres, qui provoquent une déchirure
nouvelle dans la Fraternité, peut se
résumer en ceci : "Nous avons fait confiance à la Fraternité du début, à
ses principes et à son action, toutefois nous constatons que l'esprit de la
Fraternité change, c'est par fidélité à la Fraternité initiale que nous quittons
la Fraternité actuelle !"
« Pour
justifier cette attitude, il faudra donc chercher les indices de changement. Et
dès lors, les moindres choses seront exploitées, grossies, jusqu'à devenir de
vraies calomnies. Ce fut le cas de [tel abbé] et de [tel abbé], l'accusation se
portait jusqu'à moi-même. Il fallait tromper les fidèles pour qu'ils suivent
ceux qui nous quittaient. C'est une entreprise vraiment basée sur le mensonge.
En fait, ceux qui cherchaient à opposer la Fraternité d'aujourd'hui à celle
d'hier étaient "sédévacantistes" et refusaient de prier publiquement
pour le pape. […] Il a fallu trouver des motifs à ce départ. Ce fut facile.
"Nous sommes les purs, les autres sont les impurs".
« A partir de
ce moment c'est vraiment l'esprit diabolique qui s'est emparé de nos confrères
pour trouver des manifestations de toutes les tares et de tous les vices. L'un
des premiers accusés fut l'abbé [untel], accusé d'être à l'origine de toutes
les mutations, et d'avoir tous les défauts étant donné que [tel autre prêtre] et
ses amis intimes ont découvert que l'enterrement de son père était un
enterrement juif !... [Cet abbé] serait donc juif !... Ils ont
découvert aussi que [d'autres abbés] seraient des juifs. Puis ce fut le tour
[d'autres abbés encore], atteints d'immoralité. Et même [un directeur] n'est
pas exempt, son gouvernement du Séminaire est laxiste et l'immoralité se répand
au Séminaire. Enfin le Supérieur général lui-même juge les affaires
sommairement et partialement. Je ne me fais pas d'illusion, je serai moi-même,
sans tarder, calomnié comme je l'ai été par tous ceux qui ont déchiré la
Fraternité.
« Le
processus est toujours le même, il faut à tout prix justifier l'acte scandaleux
du détournement d'un groupe de prêtres, de séminaristes et de fidèles. Tout en
nous efforçant d'éclairer ceux qui nous quittent sur le tort grave qu'ils
causent à l'œuvre de la Tradition, ne soyons pas émus, gardons la paix dans
l'épreuve. L'histoire de la Fraternité ressemble à celle de l'Eglise et la
continue. "Oportet haereses esse" !...
La Providence permet ces purifications pour éviter les contaminations. Il
s'agit dans ce dernier cas d'une fausse conception de la formation spirituelle,
qui a un relent de jansénisme. Que Dieu nous en préserve !
« Nous nous
en sommes aperçus bien tard, le mal était accompli auprès de quelques jeunes
prêtres et auprès de la moitié des séminaristes [de La Reja]. La prudence exige
de nous de n'avoir plus aucune relation avec ceux qui nous quittent, pas même
épistolaire, sauf si l'un d'entre eux donne des signes sérieux de regret.
Prions pour eux, c'est la vraie charité que nous pouvons exercer à leur égard.
Que ces séparations soient l'occasion de faire un examen de conscience, afin de
veiller courageusement à ne pas admettre de relâchement doctrinal, moral,
spirituel, disciplinaire. "Vigilate
et orate". »