Le Père Eugène de Villeurbanne avait prévenu au début des années 1980
qu’il ne fallait pas « se confiner dans un traditionalisme de
combat », cette forme de militantisme sec appliquée au monde religieux.
L’abbé Coache l’avait bien perçu, lui qui avait recueilli ces lignes au sein de
sa revue intitulée Le combat de la foi. Ce faisant, il ne faisait que
reprendre les mises en garde que Mgr Lefebvre adressait à ses séminaristes
d’Écône. Certainement, faut-il envisager un combat contre le péché et contre
l’erreur. Mais le défaut de vertu des uns ne doit pas pour autant légitimer les
excès des autres. Une vie apostolique qui aurait comme principal idéal d’être
des « antis », qui se réduirait à une lutte contre les erreurs, ou
même qui aurait comme premier objectif la lutte contre les erreurs maintiendra
ses auteurs dans les ténèbres. L’invitation que lance le fondateur de la FSSPX
en 1975 ne consiste pas à baisser les bras mais avant toute chose à se
sanctifier en faisant rayonner la charité :
« Alors il ne
faut pas non plus envisager ce combat, cette vie apostolique que vous aurez à
mener, il ne faut pas la considérer uniquement comme un pur combat contre les
erreurs, contre les difficultés, contre ce qui empêche l'Église de s'étendre.
Bien sûr qu'il faut aussi combattre les erreurs, mais il ne faut pas être en
premier lieu contre-réformiste, ne pas être d’abord dans la contre-réforme, la
contre-révolution, l'anti-libéralisme, l'anti-communisme, n’en pas faire, je
dirais, l'objectif premier et principal de votre action. Et on ne peut pas
combattre contre les ténèbres sans y mettre d'abord la lumière. Vous aurez beau
essayer, si vous ne venez pas avec la lumière, si vous êtes dans les ténèbres
et que vous essayez de chasser les ténèbres, vous pouvez toujours y aller,
elles ne s'en iront pas. [...] Il faut venir avec la
lumière. Comment aurez-vous la lumière ? Eh bien, par la grâce du Bon
Dieu, la grâce qui vous illuminera, qui vous éclairera, qui vous fortifiera et
qui sera manifeste aussi aux yeux des autres. Il faut que vous manifestiez
cela.
« Il est très
difficile de convertir les autres si on apparaît déjà soi-même comme quelqu'un
qui est faible dans la vie courante, dans la vie pratique. Ce n'est pas, par
exemple, en insultant son interlocuteur, en le méprisant, en le traitant de
tous les noms qu'on arrivera à le convaincre. Au contraire s'il s'aperçoit
vraiment d'une vraie charité envers lui, sincère, surnaturelle, désintéressée,
alors il commencera à être accroché parce qu'il aura cette impression très
nette : celui qui me parle ne parle pas pour le plaisir d'avoir le dessus
et de me convaincre, mais vraiment il veut me faire passer une vérité qui n'est
pas à lui et il ne méprise pas ma manière d'être. Et c'est très important cela.
Les saints ont converti bien plus par leur exemple, par leur prière, par leur
mortification encore que par leurs paroles. Bien sûr la parole est nécessaire,
la discussion est nécessaire, il faut convaincre, il faut prêcher évidemment,
ils ont converti par la prédication. Mais s'ils ont converti par la prédication
c'était précisément parce qu'ils étaient des saints. Les gens ont besoin de
cette sainteté. Or ceci est une chose que nous devons retenir constamment et
avoir constamment devant les yeux. »