vendredi 29 novembre 2013

Il y a 108 ans naissait Mgr Marcel Lefebvre

Le 29 novembre 1905, rue Leverrier à Tourcoing, naissait Marcel Lefebvre, fils de René Lefebvre, filateur, et de Gabrielle Watine. Sa sœur Christiane confia au Père Marziac les souvenirs qu'elle avait retenu de leur mère.
Marcel Lefebvre et sa sœur Bernadette

« Oserais-je parler sans trembler des "intuitions" de Madame Lefebvre quand elle mettait au monde un enfant ? Elle ne les embrassait jamais avant qu'ils ne soient revenus de l'église après le baptême. Louise, la servante, lui portait le bébé qu'elle embrassait et elle exprimait alors sa pensée.
« Pour le premier, René, né le 22 janvier 1903, elle désirait un prêtre et tandis qu'elle le portait, elle promit de communier tous les jours. Ce petit René, à l'âge de cinq ans écrivit une lettre au pape Pie X qui venait de promulguer une encyclique sur la communion des enfants. Il reçut un télégramme de Sa Sainteté, l'autorisant à communier. Il devint prêtre et fut missionnaire au Gabon pendant près de quarante ans.
« Pour la seconde, Jeanne, elle éprouva dès le début de la grossesse le besoin de réparation pour les péchés du monde par la prière. La fille qui naquit devint religieuse Réparatrice.
« Pendant qu'elle portait le troisième, Marcel, fortifiée de la lecture qu'elle faisait de la vie de sainte Monique, elle faisait l'édification de tous par sa patience et sa douceur, qu'elle puisait dans la prière et l'assistance quotidienne à la Messe. Après le baptême de Marcel, en l'embrassant le bébé pour la première fois, Madame Lefebvre s'exprima ainsi : "Celui-ci aura un grand rôle à jouer dans la Sainte Eglise, à Rome, auprès du Saint-Père". C'était un 29 novembre 1905 !
« Le quatrième enfant fut Bernadette. Pendant la grossesse, la maman éprouva le besoin de faire ses oraisons sur l'agonie de Notre Seigneur. Embrassant l'enfant après le baptême, elle dit : "Elle sera un signe de contradiction". Ce fut bien ce qui arriva, puisque pendant toute sa vie de religieuse elle eut à lutter, à l'image de son frère évêque (elle appartenait à la même congrégation que lui) contre l'autodéstruction de l'Eglise - que ce soit au Gabon, à Rome, ou bien à Saint-Michel-en-Brenne où elle dirige actuellement les religieuses de la Fraternité Saint-Pie X.
« Pendant la grossesse du cinquième enfant, elle lut la vie de sainte Thérèse d'Avila, réformatrice du Carmel. A la naissance de Christiane, en 1908, elle prédit qu'elle deviendrait carmélite. Celle-ci est aujourd'hui la Mère prieure du carmel de Quiévrain en Belgique, fondée le jour de la fête de sainte Thérèse le 15 octobre 1978. »
Père Jean-Jacques Marziac, Monseigneur Marcel Lefebvre, soleil levant ou couchant ?, Paris, N.E.L., 1979, pp. 55-56. 


lundi 25 novembre 2013

Mgr Lefebvre et la crise sédévacantiste de 1983

Mgr Lefebvre entouré des abbés Sanborn et Cekada
Tous deux quittent la FSSPX en 1983
En 1983, une très grave crise touche la Fraternité Saint-Pie X. Les plus anciens membres américains de la Fraternité, y compris le supérieur du district et le directeur du séminaire, s’insurgent contre le fondateur. Ils lui font des reproches en matière de doctrine et de liturgie, mais surtout sur sa position à l’égard du pape. Pour eux, le Souverain Pontife, successeur de Pierre, n’a pas plus d’autorité que le mécréant de la rue et aucune considération ne lui est due. Reconnaissant la trop grande indulgence observée jusque là, Mgr Lefebvre agit avec fermeté : Il perd un district entier, des dizaines de séminaristes et des centaines de fidèles. Il refuse énergiquement l’esprit schismatique promu par ces derniers et appelle ses prêtres à la loyauté. Il en va de la catholicité de la Fraternité Saint-Pie X.

« Beaucoup de nos confrères aux États-Unis avaient cet esprit, cet esprit sédévacantiste et je leur ai même fait signer une lettre, il y a de cela trois ou quatre ans. Je leur ai fait signer un engagement comme quoi ils ne parleraient plus ouvertement, de manière publique, contre le pape, d’une manière continuelle, pour dire qu’il n’y avait pas de pape, que ce pape est hérétique, et puis qu’ils donneraient la solution aux gens qui demandent :« Est-ce qu’il y a un pape ou est-ce qu’il n’y a pas de pape ? » ils accepteraient de donner la solution que donne la Fraternité. Alors ils ont réfléchi pendant une nuit pour savoir s’ils acceptaient ou s’ils n’acceptaient pas. Alors je leur ai dit : « Si vous n’acceptez pas, demain vous n’êtes plus dans la Fraternité ! Vous êtes hors de la Fraternité ! J’en ai assez des réclamations des fidèles, tous les fidèles me réclamant, m’envoyant des lettres : “Est-ce que c’est la position de la Fraternité qui dit qu’il n’y a pas de pape, qu’il n’y a plus de sacrements ? ”Alors que ce n’est pas notre position, qu’elle était prêchée par ces confrères. J’ai dit : J’en ai assez. “C’est fini, je veux que ça cesse ! ” Alors le lendemain ils ont signé le papier. Ils s’y sont tenus plus ou moins, du moins apparemment, mais dans le privé leur position était toujours la même, leurs sentiments étaient toujours les mêmes. Ils n’ont pas changé de sentiments. Non seulement ils n’ont pas changé de sentiments, mais au séminaire – je l’ai appris ces derniers temps –l’abbé Sanborn, directeur du séminaire, à qui je confie mes séminaristes qui sont des séminaristes qui viennent vers la Fraternité, qui ont confiance en moi, qui viennent dans notre séminaire de la Fraternité, je les confie à l’abbé Sanborn qui fait des conférences contre la liturgie qu’on fait à Ecône, pour prouver que la liturgie qu’on fait à Ecône est mauvaise ! Écoutez, alors, cela ne va plus comme cela ! J’ai été un peu tolérant, j’ai toléré un peu et je m’aperçois qu’au fond j’ai eu tort de tolérer […].
« J’ai dit : « Écoutez, je regrette beaucoup – on n’a pas eu d’éclats de voix, on ne s’est pas disputés, ça s’est passé très calmement – écoutez, moi, c’est fini ! Il y a dix ans que ça dure cette affaire-là. Je vous ai suivis, je vous connais, j’ai parlé avec vous, je vois bien que chaque fois que je venais, l’atmosphère était toujours désagréable. On sentait toujours une opposition, une dureté et une méfiance de leur part vis-à-vis de moi et vis-à-vis de la Fraternité. Ce n’était pas à l’aise du tout, toujours travaillé en arrière, un travail qui se fait en arrière, qui n’est pas conforme à l’esprit de la Fraternité. J’ai dit : « Il y a dix ans que ça dure, ça ne peut plus durer. Et maintenant vous mettez le comble à la chose avec la désobéissance à laquelle vous poussez les deux jeunes prêtres. Et maintenant, avec cette exigence, vous devenez les patrons en Amérique et puis vous exigez de nous que nous fassions ceci, que nous fassions cela. J’ai dit : - Non, c’est fini ! Je préfère tout perdre aux Etats-Unis, s’il le faut, tout l’apostolat, tout perdre et recommencer à zéro plutôt que de me trouver devant une situation comme celle-là ! Ce n’est pas possible, absolument impossible ! Faites ce que vous voudrez, mais pour nous, c’est fini, terminé ! On ne peut plus ! » […]
« Je ne veux pas être schismatique. Or ils sont pratiquement schismatiques puisqu’ils ne reconnaissent pas le pape et ne prient pas pour le pape, qu’il n’y a aucun sacrement qui soit valide, pratiquement, et ils ne veulent pas reconnaître la liturgie de Jean XXIII qui est la liturgie tridentine. Alors ils font qu’ils disent aussi que le Pape Jean XXIII n’était pas pape. Alors où est-ce qu’on va ? Alors Pie XII, puisqu’ils n’acceptent pas non plus la liturgie de Pie XII pour la Semaine Sainte, donc Pie XII n’est pas pape non plus ? Alors où est-ce qu’on va avec tout cela ? Il n’y a plus moyen, c’est de la folie, on ne raisonne plus… Alors c’est vraiment le schisme.
« Moi, je ne veux pas, d’une part, qu’ils entraînent tous les fidèles dans le schisme, en mon nom, au nom de la Fraternité, au nom de Monseigneur Lefebvre. Ça je ne peux pas accepter une affaire pareille. Je ne veux pas que les gens deviennent hérétiques, mais je ne veux pas non plus qu’ils deviennent schismatiques. On veut rester dans l’Eglise catholique. Et les gens le comprennent très bien. Si on avait là-bas dix prêtres pour remettre tout de suite là-bas en place, tous les gens voudraient rester avec nous, la plupart, 90%… Les gens saisissent très bien ces choses-là. Ils ne veulent pas devenir schismatiques non plus. Ils ne veulent pas se séparer du pape. Ils ne veulent pas dire qu’il n’y a pas de pape. Ils veulent bien que l’on ne soit pas d’accord avec le pape, comme nous le sommes, mais ils ne veulent pas qu’il n’y ait pas de pape. Ils n’acceptent pas cela.
« Et alors pour cela, déjà maintenant, plusieurs groupes demandent à l’abbé Williamson et à l’abbé Petit de venir les évangéliser, enfin s’occuper d’eux. Évidemment il faudrait qu’ils soient plus nombreux. Mais c’est triste, parce que tous ces prêtres, je ne dis pas que ce sont des mauvais prêtres, mais ils se sont fourvoyés dans une espèce de pharisaïsme, une espèce de dureté, d’ailleurs de caractère, de tempérament. Les fidèles étaient vraiment dans la terreur, un peu menés à la baguette. Alors cela crée un climat qui n’est pas évangélique, pas chrétien. Ce n’est pas catholique, ce n’est pas l’esprit de l’Evangile, tout cela ! Alors les fidèles sont un peu soulagés, ceux qui viennent se sentent comme soulagés. Au séminaire maintenant il y a un esprit excellent, tranquille, calme. Le séminaire marche bien. Ils sont dans un soulagement, ils se sentaient oppressés par cette manière raide d’être menés. Tout cela est contraire au bon sens et à la foi, l’esprit de foi. Alors ce sont des moments difficiles. On dirait que le Bon Dieu veut tous les trois ans nous donner une épreuve pour nous sanctifier et puis, en même temps, pour bien remettre dans la bonne direction la Fraternité. Que nous demeurions dans la bonne direction ! Alors je vous demande de méditer sur ces choses-là, et d’être loyaux, d’être loyaux dans vos pensées, vous avez tout de même une conscience. »
Mgr Marcel Lefebvre, conférence aux séminaristes, 20 mai 1983

samedi 16 novembre 2013

Mgr Marcel Lefebvre : A l’intérieur, la mer ne bouge pas

Les témoins de la cérémonie des sacres de 1988 ont témoigné du fait que le fondateur de la FSSPX avait débuté de manière très sereine la fameuse journée du 30 juin. Toute sa vie a consisté à ne pas trop s’émouvoir des événements qu’il vivait, ni des pressions qu’il subissait. Des avanies, des défections, des humiliations, il en a connu. Il ne s’en est pas tourmenté. Bien des évêques, autour de lui, ont flanché et ont abandonné. Les esprits peuvent s’agiter et même se passionner. Qu’importe. Mgr Lefebvre invite à toujours rester debout et à persévérer dans le calme et la détermination.

« Il ne faut pas que nous ayons une instabilité constante dans notre vie spirituelle. C’est anormal. Un chrétien, un vrai chrétien, un chrétien qui a la foi ne devrait pas être instable dans sa vie spirituelle, ne devrait pas être un jour dans l’euphorie, le lendemain dans le découragement, dans l’inquiétude, dans l’angoisse, dans la tristesse, et puis tout à coup dans la joie. Ce n’est pas une vie chrétienne normale.

« Une vie chrétienne normale, qui est vraiment fondée en Notre Seigneur Jésus-Christ, en sa divinité, dans toutes les vertus que Notre Seigneur Jésus-Christ nous enseigne, devrait être une vie stable, une vie profonde, pour laquelle, je dirais, les événement qui pourraient éventuellement secouer un peu sa vie spirituelle et sa vie surnaturelle, ne sont que des événements de surface comme les vagues de la mer. La mer ne bouge pas à l’intérieur. Les sous-marins qui sont à l’intérieur de l’eau sont toujours dans la tranquillité. Il n’y a pas de vagues là-dessous. Mais évidemment, au fur et à mesure que l’on remonte à la surface, on commence à sentir les vagues, même la tempête éventuellement. Et bien, ça ne devrait pas changer notre intérieur. Même si il y a quelques vagues de surface, même si il y a quelques événements de surface, ça devrait rester stable.

« Et ça, c’est une chose, malheureusement, qui existe même encore aujourd’hui. Quelquefois j’ai un peu de peine de sentir que même parmi ceux qui sont passés par ici, il y en a quelques-uns qui sont comme ça un peu secoués profondément et qui seraient tentés quelquefois de se laisser aller à des décisions qui sont anormales. […] On doit s’attacher à Notre Seigneur de toute son âme et, par conséquent se détacher des autres choses, ne pas être attachés à sa famille, aux siens, à sa patrie, à tout ce qui est secondaire par rapport à Notre Seigneur Jésus-Christ, même si on nous demande de quitter notre patrie pour aller évangéliser une autre nation. C’est toujours Notre Seigneur, c’est toujours l’Évangile, c’est toujours le règne de Notre Seigneur Jésus-Christ. Le fait de changer de région, le fait de changer d’espaces, qu’est-ce que ça peut faire ? Au contraire.


« Peut-être justement qu’une foi profonde dans la divinité de Notre Seigneur Jésus-Christ nous met nécessairement dans l’humilité. C’est la première conséquence de l’adoration de Notre Seigneur Jésus-Christ. C’est pour cela que notre Sainte Messe est si belle, parce qu’elle constamment une manifestation de l’adoration de Notre Seigneur Jésus-Christ. »

Mgr Marcel Lefebvre, conférence du 8 juin 1978

samedi 9 novembre 2013

Mgr Lefebvre : Même dans la crise, « douceur, bonté, patience, longanimité ! »

Comme Mgr Lefebvre aurait pu se révolter ou se décourager devant les événements sous prétexte qu’ils étaient pires que ceux de la veille ! Tant de ses confrères évêques ou prêtres ne sont-ils pas usé par les défaites et les revers ? Relégué maintes fois par les prélats de son époque, traîné dans la boue par les médias en tous genres, il a dû faire face aux calomnies comme aux scandales les plus grands dans l’Église. Pourtant, c’est toujours la joie chrétienne qui a rayonné en lui. Nulle rage, nulle aigreur, nul découragement. Lorsqu’il prêchait la vérité, c’est une bonté sans borne pour l’âme de ses interlocuteurs qui animait constamment sa fermeté dans la doctrine.

Le 18 mai 1986, en la fête de la Pentecôte, il donnait ce conseil à ceux qui lui faisaient confiance : Gardez, même dans les épreuves, la douceur, la bonté, la patience et la longanimité. Pourtant, un mois auparavant, le pape avait pénétré dans une synagogue. Quatre mois auparavant, c’est dans la stupeur que le monde catholique avait accueilli l’annonce de la journée interreligieuse de la paix qui devait se dérouler en octobre à Assise. Le fondateur de la Fraternité avait tout motif de sombrer dans une dénonciation sans limite, voire dans un discours rageur et aigre. Aujourd’hui, par excès ou par usure, nous pourrions être exposés aux mêmes écueils.

Sans doute le secret de cette figure qui traverse toute la crise avec une extraordinaire abnégation réside-t-il dans cette charité qui l’a jadis fait évangéliser l’Afrique puis sillonner le monde. Jusqu’à son dernier souffle, il ne s’est jamais affranchi de sa devise épiscopale : Et nos credidimus caritati.

« Quels seront les fruits du Saint-Esprit au cours de cette vie terrestre, dans ces contacts avec les événements quotidiens, avec les difficultés, les épreuves, les doutes, les hésitations, les angoisses ? Saint Paul énumère la patience, la bénignité, la bonté, la longanimité. Voilà les fruits qui relèvent en définitive de l’espérance. Les Apôtres ont désormais les yeux fixés sur le Ciel, les yeux fixés sur Dieu, sur le bonheur éternel qu’ils attendent avec un espoir profond. In te Dómine, sperávi, non confúndar in ætérnum (Ps 70, 1). « En vous, mon Dieu, j’ai placé mon espoir, et nous ne serons pas confondus », c’est bien ce qu’ils devaient se dire. Dès lors toutes les choses de la terre leur apparaissent sous un autre jour, ils n’y sont plus attachés. Dans les difficultés, dans les souffrances, dans les angoisses, ils avaient ces dispositions de patience, de bonté, de douceur, de longanimité. N’est-ce pas ce que l’on rencontre chez les vrais chrétiens, chez les vrais catholiques ? Ce visage de douceur, de bonté, de patience, de longanimité dans les épreuves, dans les difficultés, dans les soucis quotidiens ? […]

« Examinons-nous. Avons-nous conscience d’avoir reçu les fruits du Saint-Esprit ? Avons-nous conscience d’être vraiment près de Dieu, d’avoir Dieu en nous, de connaître Dieu, de mesurer la charité de Dieu ? Rappelons-nous la magnifique épître de saint Paul que nous lisons si souvent à l’occasion de la fête du Sacré-Cœur, l’épître aux Éphésiens, dans laquelle saint Paul décrit la hauteur, la profondeur, l’immensité de la charité de Dieu (Ép 3, 18-19). Avons-nous conscience de cette charité de Dieu envers nous ? Vivons-nous vraiment près de Dieu ? Et par conséquent, est-ce que nous partageons la paix et la joie de Dieu, dès ici-bas, par la présence du Saint-Esprit en nous, par l’effusion du Saint-Esprit en nous ?

« Est-ce que nous participons aussi à tous ces fruits qui nous sont donnés, pour marcher vers notre éternité au milieu de toutes les difficultés de ce monde, au milieu de toutes les tentations de ce monde corrompu, de tous les obstacles qui se présentent à notre vie chrétienne, et de tous les attraits du péché ? Vivons-nous vraiment de ces fruits du Saint-Esprit qui sont la patience, la bonté, la douceur, la magnanimité, la longanimité ? Comme il est bon de se rappeler ces choses ! Tous les jours, peut-être, nous avons à exercer ces vertus, ou alors nous nous révoltons devant les événements qui nous entourent, et nous nous opposons à la volonté du Bon Dieu. Lorsque nous souffrons, comme nous souffrons aujourd’hui dans l’Église et par l’Église, sommes-nous dans ces dispositions de patience, de douceur, de mansuétude vis-à-vis des épreuves que le Bon Dieu permet que nous subissions, même de la part de nos frères ? »

Ecône, Sermon du 18 mai 1986

vendredi 1 novembre 2013

Mgr Lefebvre : Comment envisager une solution à la crise ?

Le 24 février 1977, on interroge Mgr Lefebvre sur l’avenir : « Comment envisager le retour à une situation normale ? » lui demande-t-on. Très prudemment, le fondateur de la FSSPX n’impose pas – il ne l’a d’ailleurs jamais fait – un cahier des charges. Il remet cela à la Providence, tout en disant de manière réaliste que la solution proviendrait du pape. En revanche, il insiste beaucoup sur la manière de se comporter en attendant. Plus les actes posés ou les propos tenus par les autorités provoquent le scandale, plus il est tentant d’assouvir des passions en vidant son sac, en recourant à des jugements emportés ou des termes excessifs. Mgr Lefebvre bannit ces mauvais moyens. Il préconise à l’inverse le respect de la hiérarchie, l’affranchissement des anathèmes ou des polémiques stériles et il invite à déployer une véritable « affection sacerdotale » auprès des prêtres extérieurs.

« Dès lors qu'il s'agit de l'avenir, nous savons qu'il appartient à Dieu et qu'il est donc difficile de faire des prévisions. Cependant constatons d'abord que l'anomalie dans l'Église n'est pas venue de nous, mais bien de ceux qui se sont efforcés d'imposer une orientation nouvelle à l'Église, orientation contraire à la Tradition et même condamnée par le Magistère de l'Église. Si nous apparaissons être dans une situation anormale, c'est parce que ceux qui ont l'autorité aujourd'hui dans l'Église brûlent ce qu'ils adoraient autrefois et adorent ce qui était brûlé autrefois. Ce sont ceux qui se sont écartés de la voie normale et traditionnelle qui auront à revenir à ce que l'Église a toujours enseigné et toujours accompli.

« Comment cela pourra-t-il se faire ? Humainement parlant il semble bien que seul le Pape, disons un Pape, pourra rétablir l'ordre détruit dans tous les domaines. Mais il est préférable de laisser ces choses à la Providence divine.

« Toutefois notre devoir est de tout faire pour garder le respect de la hiérarchie dans la mesure où ses membres en font encore partie, et de savoir faire la distinction entre l'institution divine à laquelle nous devons être très attachés et les erreurs que peuvent professer de mauvais bergers. Nous devons faire tout ce qui est possible pour les éclairer et les convertir par nos prières, notre exemple de douceur et de fermeté.

« A mesure que nos prieurés se fondent, nous aurons ce souci de nous insérer dans les diocèses par notre véritable apostolat sacerdotal soumis au successeur de Pierre, comme successeur de Pierre, non comme successeur de Luther ou de Lamennais. Nous aurons du respect et même de l'affection sacerdotale pour tous les prêtres, nous efforçant de leur rendre la vraie notion du sacerdoce et du sacrifice, de les accueillir pour des retraites, de prêcher des missions dans les paroisses comme le bienheureux de Montfort, prêchant la Croix de Jésus et le vrai Sacrifice de la Messe.

« Ainsi par la grâce de la Vérité, de la Tradition, les préjugés à notre sujet s'évanouiront, du moins de la part des esprits encore bien disposés, et notre future insertion officielle en sera grandement facilitée. Évitons les anathèmes, les injures, les quolibets, évitons les polémiques stériles, prions, sanctifions-nous, sanctifions les âmes qui viendront à nous toujours plus nombreuses, dans la mesure où elles trouvent en nous ce dont elles ont soif, la grâce d'un vrai prêtre, d'un pasteur des âmes, zélé, fort dans sa Foi, patient, miséricordieux, assoiffé du salut des âmes et de la gloire de Notre Seigneur Jésus-Christ [1]. »




[1] Mgr Lefebvre, le coup de maître de Satan, éd. Saint-Gabriel, 1977