mercredi 29 mai 2013

Mgr Lefebvre : Qu'ils trouvent chez vous une assistance compréhensive

La première épître de saint Paul aux Corinthiens fait penser à l’attitude de Mgr Marcel Lefebvre : « La charité ne fait rien de messéant, elle ne cherche pas son intérêt, elle ne s’emporte pas, elle ne tient pas compte du mal. Elle ne prend pas plaisir à l’injustice, mais elle trouve sa joie dans la vérité. Elle excuse tout, elle croit tout, elle espère tout, elle endure tout. » Ces quelques mots résument l’attitude d’un prélat avenant qui a fondé sa consolation sur la foi, n’a pas lorgné sur les défauts de ses confrères, n’a jamais nourri aucune rancune ni aigreur et ne s’est pas attaché à indisposer maladroitement. Fort de ses cinquante ans d’activité missionnaire, le fondateur de la Fraternité Saint-Pie X invitait ses séminaristes à faire preuve de mansuétude et de patience envers les nouvelles recrues, malgré leurs défauts, malgré leur mauvaise formation éventuelle. Le tentateur invite-t-il à s’impatienter et à s’exaspérer sur les défauts de ceux qui n’épousent pas les canons de nos préjugés ? Nous pousse-t-il à forcer le trait sur notre voisin de banc ou sur notre prochain ? Mgr Lefebvre répond de manière simple, vivant pleinement sa devise : « Et nous, nous avons cru en la charité » :

« Si j’ai demandé à ceux qui viennent d’arriver aujourd’hui de ne pas être présents à cette conférence, c’est parce que je voulais précisément vous donner quelques conseils à leur propos. Quelles doivent être les relations que vous devez avoir avec ceux qui arrivent ? Eh bien, je pense que vous devez d’abord les accueillir le plus charitablement possible, le plus aimablement possible, vous faire leurs guides car ils sont un peu perdus dans la maison. Et, dans le règlement, il y a bien des détails qu’ils ne connaissent pas. Par conséquent, vous devez les aider, ils doivent trouver chez vous une assistance compréhensive et surtout – chose plus importante encore – avec le temps, vous les connaîtrez davantage, vous constaterez chez eux certainement ce qui s’est trouvé chez vous aussi.
 
«  Il y a parmi les quarante qui sont là toute une gamme d’opinions, de manières de voir les choses ; il y en a qui n’ont aucune difficulté à s’assimiler à la maison parce qu’ils se sont trouvés dans un milieu dans lequel ils étaient déjà comme s’ils étaient au séminaire, du moins avec les mêmes pensées, les mêmes idées ; leurs parents pensaient comme eux, comme nous : il n’y a pas de difficultés, donc ils se trouvent ici dans leur milieu, sans aucun hiatus, sans aucune difficulté. Mais il faut comprendre aussi et il faut être très charitable et très compréhensif pour ceux qui n’ont pas eu ce bonheur, qui n’ont pas eu cette grâce de se trouver dans un milieu qui d’emblée s’est opposé aux réformes et qui a voulu maintenir la tradition de l’Église. Alors il y en a certainement qui auront un peu de peine à se faire au milieu, soit à cause du latin soit à cause de l’ambiance qu’ils peuvent trouver ici. Alors, aidez-les et ne les rebutez pas ! Ne soyez pas durs avec eux ou ne leur faites pas de reproches, ne les considérez pas comme des gens qui ne sont pas à leur place ici comme si vous aviez, vous, à les juger.
 
« Il faut donc au contraire savoir les comprendre qu’il y en a qui peuvent avoir un peu de difficultés à assimiler les idées et la manière de penser, de voir les choses comme on les voit ici. Mais vous pouvez faire beaucoup dans un sens ou dans l’autre : vous pouvez aider ceux-là à mieux assimiler les principes qui vous sont donnés ici, et vous pouvez au contraire les éloigner et peut-être un jour, je dirais, les contraindre à partir et, peut-être, par conséquent, avoir brisé une vocation soit par manque de compréhension, par manque de charité, par rudesse, par un peu d’orgueil. Alors, il faut les comprendre ! Et s’il y en a qui vous disent des choses qui vous paraissent maintenant inadmissibles et qui sont à juste titre inadmissibles, laissez-les parler ! Et, tout doucement, faites leur voir les difficultés, les objections de ce qu’ils disent et, tout doucement, les amener, leur donner, leur faire venir la lumière que vous avez et dont vous profitez ici et non pas tout de suite prendre une position ego contra : « Mais comment ? C’est inadmissible ! Mais comment pensez-vous des choses comme ça ? Mais votre place n’est pas ici ! »
 
« Évidemment, Qu’est-ce que vous voulez qui arrive dans la situation actuelle ? Il faut bien se dire que ce sera de plus en plus comme ça et ceux qui sortent des écoles catholiques ne savent plus rien, non seulement ne savent plus rien mais ont une foi déformée ! Alors c’est déjà une grâce pour eux de venir ici, d’être attirés et d’avoir la grâce et le courage de venir à Écône. Ils ont peut-être été très réprimandés par leur entourage, réprimandés par des prêtres : « Mais comment ? Aller à Écône ? Enfin ! On n’a pas idée de ça ! Il ne faut pas y aller ! Ce sont des gens qui sont hors de l’Église ! Vous allez chez des schismatiques, chez des hérétiques ! »
 
« Alors eux ont eu le courage de briser ces obstacles et de venir quand même à Écône et, quelquefois, malgré leurs parents. Alors si maintenant ils arrivent ici et qu’ils sentent un manque d’affection, un manque de compréhension, une dureté de la part du milieu dans lequel ils se trouvent, ça les rejette dans leur milieu. Au lieu de les attirer, ça les rejette et ils pourraient peut-être dire à juste titre : « Ah voilà ! C’est ça, c’est ce qu’on m’avait dit du milieu intégriste. Ce sont des gens durs, austères, qui n’ont pas de compréhension, pas de charité, ils ne font de quartiers pour rien, il est absolument impossible de parler avec eux, impossible d’avoir une conversation aimable… » Alors il ne faut pas que ce soit comme cela. Ce sont là des manières de faire qui font preuve d’un manque d’humilité et d’un manque de charité.
 
« Nous ne devons jamais nous enorgueillir des dons et des grâces que le bon Dieu nous a faits car ils ne viennent pas de nous, c’est le bon Dieu qui nous les a données et nous devons précisément essayer de les communiquer aux autres, essayer de faire que les autres puissent avoir les grâces et les dons que le bon Dieu nous donne ! Alors je tenais à vous dire cela parce que, depuis hier déjà, j’ai déjà pu parler avec certains de ces jeunes et je me suis très bien rendu compte que pour certains d’entre eux, déjà, les simples cérémonies auxquelles ils ont assisté les déroutent complètement. Il y en a qui n’ont jamais assisté à une cérémonie en latin, ils ne savent pas ce que c’est ! Alors évidemment vous, vous trouvez cela tout à fait normal mais certains d’entre eux n’ont jamais assisté à une cérémonie en latin, c’est un monde nouveau dans lequel ils entrent. Alors aidez-les à entrer dans ce monde nouveau, dans ce monde qu’est l’Église ! Aidez-les à entrer et n’agissez pas de telle manière qu’ils se croient obligés de partir. »
 
Conférence aux séminaristes d’Écône, 5 octobre 1974


mercredi 22 mai 2013

Sermon de Mgr Lefebvre pour la Pentecôte : l’action de l’Esprit Saint en nous

Membre de la Congrégation des Pères du Saint-Esprit, Mgr Marcel Lefebvre nourrissait une grande dévotion pour la troisième personne de la Sainte Trinité. Il voyait en elle celle qui transforme les hommes. Sine tu nomine, nihil est in nomine. A l’occasion d’un sermon de la vigile de la Pentecôte, le fondateur de la Fraternité Saint-Pie X insistait en ces termes sur les fruits de l’action du Saint Esprit sur les âmes :

« Et les apôtres se sont donc réunis au Cénacle pour attendre la venue de l'Esprit Saint. Car c'est cela que Notre Seigneur voulait leur donner. Le Ciel avait disparu de leurs yeux et presque de leurs cœurs. Or c’est précisément le Ciel que Notre Seigneur voulait leur donner et leur donner par l'Esprit Saint.
 
« Car ce n'est pas autre chose que l'Esprit Saint dans nos cœurs : c'est le Ciel dans nos cœurs. C'est le Paradis commencé dans nos âmes. Si nous comprenons bien ce qu'est le Saint-Esprit et la grâce que le Bon Dieu nous donne par l'Esprit Saint dès le jour de notre baptême et par tous les sacrements que nous recevons et particulièrement dans la Sainte Communion, nous comprendrions que c'est le Ciel que nous recevons.
 
« Les apôtres ont été remplis de l'Esprit de Jésus au moment de la Pentecôte et le Ciel a donc pris possession de leurs âmes et de leurs cœurs et jamais plus ils ne sont séparés de cet Esprit Saint et de Jésus. Ils ont compris tout ce que Jésus leur avait dit. Ils ont compris ce qu'était le Ciel par rapport à la terre ; ce qu'était l'esprit par rapport à la chair ; ce qu'étaient ces biens ineffables, ces biens éternels, devant les choses temporelles. Ils ont compris. Jusque là, ils n'avaient pas compris.
 
« Et quelle fut l'influence du Saint-Esprit dans leurs âmes ? C'est saint Paul qui nous le décrit par deux fois. Une fois lorsqu'il énumère les différents fruits du Saint-Esprit dans nos âmes. Je ne pourrai vous les énumérer tous, mais il parle de la patience, de la bénignité, de la mansuétude, de la paix, fruits du Saint-Esprit dans les cœurs. Et il le redit lorsqu'il parle des avantages de la charité, des qualités de la charité :
 
Caritas patiens est, benigna est, caritas omnia suffert, omnia crédit, omnia sperat (I Co XIII, 4) : « La charité est patiente, la charité souffre, la charité croit, la charité espère, la charité aime, la charité demeure toujours ». Voilà ce que saint Paul énumère et décrit de la charité, décrit de l'Esprit Saint. Et c'est cela l’Esprit Saint. C'est à cela que nous reconnaîtrons si nous avons l'Esprit Saint en nous. Si nous sommes humbles, doux, charitables, paisibles. Voilà les fruits que Notre Seigneur donne à ceux qui reçoivent le Saint-Esprit. »
 
Mgr Marcel Lefebvre
17 mai 1975

dimanche 12 mai 2013

Mgr Lefebvre : pour un épiscopat catholique


Le vingt-cinquième anniversaire des sacres épiscopaux d'Ecône approche. Les semaines qui ont précédées cette cérémonie ont été marquées par des échanges entre le Saint-Siège et la Fraternité Saint-Pie X. Dans l'une de ses lettres, le fondateur de cette dernière expose au pape Jean-Paul II l'absolue nécessité d'obtenir un épiscopat pleinement catholique et traditionnel et explique donc l'esprit qui l'anime dans la préparation de cette cérémonie.

Écône, le 20 mai 1988,

Très Saint Père,
Tandis qu’une certaine espérance se levait, au sujet d’une solution possible du problème de la Fraternité, après la signature du protocole, voici qu’une grave difficulté surgit à l’occasion de l’épiscopat accordé à la Fraternité pour me succéder dans ma fonction épiscopale.
Il apparaît clairement que cet épiscopat est pour le Saint-Siège une source d’appréhensions et de soucis pour les motifs suivants :

  • En premier lieu cet épiscopat est superflu, après la reconnaissance légale de la Fraternité comme société de droit pontifical, le Supérieur général pouvant donner des lettres dimissoriales à un évêque de son choix.
  • En seconde lieu, cet épiscopat peut apparaître comme une certaine réprobation des évêques actuellement en fonction, et indisposera les évêques à l’égard du Saint-Siège.
  • Enfin, cet épiscopat peut éventuellement créer des difficultés dans les diocèses à l’occasion de l’apostolat auprès des fidèles.

Ce sont, sans doute, ces appréhensions qui provoquent des délais, des réponses évasives de la part du Saint-Siège, depuis plus d’un an, et qui m’obligent moralement à mettre un terme à cette attente, après avoir insisté à plusieurs reprises sur l’urgente nécessité pour la continuation et le développement de l’œuvre d’avoir plusieurs évêques.

Le 30 juin m’apparaît désormais comme la date ultime pour réaliser cette succession. La Providence semble avoir préparé cette date. Les accords sont signés, les noms des candidats sont proposés. Si le cardinal Ratzinger a un emploi du temps trop chargé pour préparé les mandats, le cardinal Gagnon pourrait peut-être s’en charger.

Très Saint-Père, veuillez mettre un terme à ce douloureux problème des prêtres, des fidèles et de votre serviteur qui, en gardant la Tradition, n’ont eu d’autre désir que de servir l’Église, le pape et sauver leurs âmes.

Permettez que j’ajoute quelques considérations sur le renouveau de l’Église obtenu par le moyen de la Fraternité et l’épiscopat qui lui serait accordé.

La presse en rapportant les incidents de Vienne en Autriche et de Coire en Suisse à propos des nominations épiscopales fait allusion à un changement d’orientation de la part du Saint-Siège dans le choix des évêques. C’est un heureux présage, mais les réactions manifestent que ces évêques auront d’énormes difficultés dans la réalisation de leur apostolat et qu’ils seront obligés de manifester leur adhésion à l’esprit moderne par l’œcuménisme, le charismatisme, afin de calmer les esprits.

Leurs séminaires, même s’ils observent une certaine discipline et une plus grande piété, seront imbus de cet esprit moderne et contribueront difficilement au vrai renouveau de l’Église.

Le renouveau ne peut désormais se réaliser que par des évêques libres de faire revivre la foi et la vertu chrétienne par les moyens que Notre Seigneur a confiés à son Église pour la sanctification des prêtres et des fidèles. Seul un milieu entièrement dégagé des erreurs modernes et des mœurs modernes peut permettre ce renouveau. Ce milieu, c’est le milieu qu’ont visité le cardinal Gagnon et Monseigneur Perl, milieu formé de familles profondément chrétiennes, ayant de nombreux enfants, et d’où proviennent de nombreuses et excellentes vocations.

Le développement de ce milieu rénové, encouragé par vos décisions, Très Saint Père, restaurera les diocèses par les contacts avec les évêques et le clergé. Certains évêques nous confieront la formation de leurs séminaristes et ainsi, avec la grâce de Dieu, l'Église retrouvera une nouvelle jeunesse et transformera la société païenne en société chrétienne.

Vous comprendrez facilement pourquoi un seul évêque ne saurait suffire dans un champ d’apostolat aussi vaste.

Si je me permets de soumettre ces considérations à votre jugement, c’est dans le plus profond désir de vous venir en aide pour solutionner ces graves problèmes que vous efforcez de résoudre au cours de vos voyages apostoliques.

Daignez agréer, Très Saint Père, l’expression de mes sentiments les plus respectueux et filiaux en Jésus et Marie.
Marcel Lefebvre
Archevêque, évêque émérite de Tulle
Fondateur de la Fraternité S.-Pie X
 Lettre parue dans Fideliter hors série - 29-30 juin 1988, pp. 45-47.

dimanche 5 mai 2013

Prêtres pour demain !

En 1986 fut réalisée à Ecône un reportage intitulé : Prêtres pour demain. Il manifeste l'amour du sacerdoce qui animait le fondateur de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X. Loin des grandes crises qui secouèrent l'histoire de l'oeuvre, le travail du séminaire s'accomplit dans le silence et la prière.