Nous transcrivons la suite de la
conférence que Mgr Lefebvre dispensait à ses futurs prêtres à Écône le 8 juin
1975. Le séminaire était sur le point de se voir retirer officiellement son
approbation canonique et les critiques commençaient à fuser sur cette œuvre qui
acquerrait peu à peu une notoriété internationale. Face aux insultes qui pleuvaient
(séminaire sauvage, évêque de fer, prélat rebelle, etc.), grand était le danger
de répliquer et de s’aventurer dans une posture caractérisée par l’animosité.
Le fondateur prévient : loin de plaider en faveur de notre cause, une
telle attitude la desservirait profondément car elle serait le reflet de notre
manque de sainteté. Comme substitut, il présente l’idéal christique, qui ne
s’agite pas mais qui sur fonde sur la patience et le silence, celui de Notre
Seigneur devant ses juges.
« Et vous
savez bien — je l’ai dit maintes fois — que je souhaite vraiment que, même
entre vous, même dans les propos de table, même dans les propos de récréation,
on ne dise pas des paroles méprisantes contre les personnes. Qu’on lutte
contre les erreurs, oui ! Qu’on parle contre les erreurs oui ! Mais
tenir des propos méprisants contre les personnes, à plus forte raison quand il
s’agit de personnes comme le Saint Père, comme les cardinaux, ce n’est pas
normal. Qu’on dise qu’on pense que ce qui est dit dans tel acte, dans telle
phrase, cela nous choque, qu’on en discute, très bien, on peut très bien
discuter ! Mais de là à attaquer les personnes méchamment, les traiter
avec mépris, ce n’est pas une manière de faire, cela n’avance à rien,
absolument à rien ! […]
« Vous
savez, le séminaire c’est la recherche de la sainteté. Et plus tard, si vous
voulez que le séminaire, malgré toutes les épreuves qu’il traverse, malgré
toutes les critiques que l’on peut lui faire, si vous voulez que ces cardinaux,
tous ces évêques qui nous critiquent, finissent par reconnaître le séminaire,
finissent par reconnaître que Écône a fait du bien, finissent par reconnaître
que les prêtres qui sortent du séminaire sont de bons prêtres, il faut que nous
le prouvions par notre sainteté, c’est cela qui convaincra de la vérité et du
bien du séminaire et du bien de la Fraternité, c’est cela !
« Si au
contraire ils se trouvent devant des gens excités, agités, ayant toujours à la
bouche des paroles pénibles, désagréables, des épithètes méprisantes, ils
n’auront aucune estime du séminaire : le séminaire a formé des gens qui ne
sont pas des saints. Les saints ne parlent pas comme cela ; les gens qui
ont l’esprit de sagesse, l’esprit de mesure, l’esprit de prudence, l’esprit de
conseil ne parlent pas comme cela. Alors il faut arriver à acquérir cet
équilibre, cette mesure, cette prudence, cet esprit de conseil, cet esprit de
sagesse. C’est cela la sainteté : l’esprit des béatitudes ! Relisez
et relisez les béatitudes, méditez les béatitudes et tout le chapitre qui suit
les béatitudes : On vous frappe sur la joue droite ? Eh bien,
présentez la joue gauche ! Ce n’est pas si facile que cela, parce que ce
n’est pas seulement quand on frappe sur la joue qu’on réagit, mais même quand on
entend un mot, un seul mot. Oh ! Tout de suite on prend feu, on prend
feu ! Alors qu’est-ce que ce serait si on était frappé sur la joue ?
Est-ce que vous croyez qu’on présenterait l’autre ? Ça se peut… Il y a
peut-être des membres qui se lèveraient tout de suite ! Ou le pied ou le
poing !
« Eh bien, il faut pourtant se plier à ce que le
Bon Dieu demande : Si on vous frappe sur la joue gauche, présentez la joue
droite ; ou sur la joue droite, présentez la joue gauche. Si on vous
demande de faire mille mètres, faites-en deux mille. Si on vous demande votre
vêtement, donnez encore plus que votre vêtement, donnez le double. Il faut
arriver à être comme cela, à être bon, à être charitable, à être condescendant,
à être patient et savoir supporter. On vous insulte, on vous a dit une petite
insulte, une petite chose qui vous est désagréable ? Mais passez là-dessus et
que la prochaine fois que vous revoyez votre confrère vous êtes avec lui comme
s’il n’avait rien dit. Il faut arriver à cela, il faut arriver à surmonter les
difficultés. C’est cela qui permet vraiment que l’esprit de Notre Seigneur
règne dans le séminaire ! »
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